Liberation-camps

La Libération des camps de concentration
par Françoise Rosenzweig-Leclère

Au fur et à mesure que les troupes alliées, Américains, Britanniques, et Français à l’Ouest, Soviétiques à l’Est, progressent vers l’Allemagne, les camps nazis dévoilent leur barbarie.

Une première phase
La libération des camps se fait progressivement, au rythme de l’avance des armées alliées, et dans des conditions variables, selon que les internés ont réussi ou non à constituer des comités de libération, parfois armés. Face à l’échéance du châtiment, les nazis, dont certains rêvent de négociations avec les Occidentaux (Himmler, pourtant principal responsable du système concentrationnaire dans la hiérarchie nazie), évacuent les déportés des camps de l’Est puis du centre de l’Allemagne vers ceux de l’Ouest et du Sud. Ces déplacements se font à pied ou en wagons découverts. Ils sont connus sous le nom de "marches de la mort", car ils ont été accompagnés d’exécutions, de fusillades et de massacres.
On estime à 35% le nombre de déportés victimes de cet exode (300 000 environ). Les premiers camps évacués sont ceux de Pologne orientale et des pays baltes: Majdanek, près de Lublin, est libéré le 24 juillet 1944 par les Soviétiques. Les survivants du camp ont été transférés vers Auschwitz le 17 juillet par les SS. En septembre, les déportés du Struthof, en Alsace, sont déplacés à Dachau. Les Alliés y pénètrent le 23 novembre. En janvier 1945, les grands camps de Pologne sont libérés à leur tour. Un grand nombre de détenus avaient été déplacés vers Buchenwald - le Docteur Breiman, médecin à Crillon dans l’Oise a résisté à cette marche de la mort.

L'accélération de la libération
C’est au printemps 1945 que s’accélère la libération des camps. Quand les troupes américaines parviennent à Buchenwald, le 11 avril, le camp s’est déjà libéré lui-même, grâce à son comité de libération. Mais certains de ses kommandos ont été soumis à une marche de la mort vers le sud, en direction de la Tchécoslovaquie. Ce fut le cas pour le kommando de Neue –Stassfurt, dont Jacques Vigny de Compiègne fait partie. Flossenbourg, où ont été déportés des Creillois, fut libéré le 23 avril, Dachau, où Ernest Biette de Montataire a été interné, le 29 avril, et le 2 mai, Neuengamme, où se trouve Marcel Mérigonde, instituteur dans le Noyonnais. Ravensbrück, le camp des femmes où était détenue Madeleine Blin, institutrice à Méry la Bataille dans l’Oise, a été libéré le 30 avril. Le dernier camp, l’un des plus mortels en raison de sa célèbre carrière, celui de Mauthausen, en Autriche, est libéré le 5 mai 1945 par les troupes américaines. Comme Buchenwald, Mauthausen s’est libéré lui-même grâce à son comité de libération créé par des Autrichiens et des Yougoslaves : la liaison entre ce comité et les détenus français se fait par l’intermédiaire d’Arthur London. (Tchèque, ancien brigadiste en Espagne, et responsable FTP-MOI en France pour la propagande défaitiste en direction des soldats allemands).

Les Alliés font face
Les Alliés libérateurs doivent affronter des problèmes redoutables : l’état de santé d’abord des déportés dont beaucoup sont atteints du typhus. La ré-alimentation d’organismes profondément dénutris présente aussi des difficultés inconnues des Alliés. Nombre de déportés meurent dans les jours, les semaines qui suivent leur libération, comme André Desmarest, originaire de Monceaux, près de Cinqueux et qui succombe à l’hôpital de Nuremberg, quelques jours après la libération de Buchenwald. Il faut organiser la distribution de vivres, de vêtements, et les retours. Dans son témoignage « Ceux qui vivent », Jean Lafitte décrit comment, avec Jean Biondi, ancien maire de Creil, il a participé à cette période de post – libération du camp.

Le retour en France
Si le retour des prisonniers de guerre semble avoir été relativement aisé grâce à des transports militaires, celui des déportés a été beaucoup plus chaotique. Certains, pris en charge par la Croix – Rouge, passent par la Suède avant de retrouver le sol français. C'est le cas de Madeleine Blin. D’autres transitèrent par la Suisse. Certains autres encore subissent un long périple par Odessa. Leurs moyens de transports sont variés, avion, bateaux, wagons à bestiaux. Les plus chanceux sont rapatriés par voyages individuels comme Robert Antelme ou Jacques Lusseyran.
Arrivés en France, les déportés sont accueillis à l’hôtel Lutetia, à Paris, où ils subissent des examens médicaux, sont identifiés, remplissent des formalités administratives et reçoivent cigarettes, chocolat et une indemnité lorsqu’ils sont de nationalité française (les apatrides n’y ont pas droit, même s’ils ont combattu en France. C’est le cas de Jorge Semprun, réfugié espagnol, déporté en raison de sa participation à la Résistance en France).

Il leur reste à construire leur vie lorsqu’il s’agit des enfants, ou à la reconstruire pour les adultes, malgré leurs handicaps physiques et psychologiques – les enfants n’ont pas été scolarisés, les adultes doivent lutter contre des dépressions profondes.
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