1913 Camp de Royallieu

Royallieu avant la Seconde Guerre mondiale
par Jean-Yves Bonnard

Situé à 900m au sud-ouest de Compiègne, le hameau de Beaulieu devient au 12e siècle le siège d'une maison de chasse royale. En 1153, la reine Adélaïde, veuve de Louis VI, décide par une charte de franchise d'accorder des droits d'usage dans la forêt à ceux qui construiraient des maisons à proximité de cette résidence. Bientôt, le hameau prend les noms de Beaulieu, la Neuville-aux-Bois et Franqueville à cause des droits d'usage renouvelés plusieurs fois sous le règne de Louis VII et de Charles VI. Le site devient bientôt le Royal-Lieu.
Le priéuré de Philippe-le-Bel
La proximité immédiate de la forêt giboyeuse fait de la maison de chasse un lieu de séjour pour les rois de France, notamment Philippe-Auguste et Philippe-le-Bel (1284-1314). Ce dernier, par une charte de juin1303, décide de la fondation d'un prieuré qu'il confie à l'ordre du Val des écoliers (règle de saint Augustin). Une église dédiée à Saint-Louis, grand-père du roi, est alors construite et y conservera une parcelle de la vraie croix.
A partir de 1311, la maison royale est  dénommée Royal-Lieu (Regalem locum) et voit y séjourner durant la bonne saison plusieurs rois de France. 
Avec la construction du château à l'intérieur des remparts, sous Charles V (1364-1380), la résidence de Royal-Lieu, qui connait un incendie en 1334, est délaissée. Le siège anglais de Compiègne, en 1430, conduit à la destruction complète du hameau et de la maison royale, mais le couvent est épargné. Il connait alors un rapide déclin.

Illustration:
La chasse au cerf à la vue de Compiègne, tapisserie de la manufacture des Gobelins d'après Jean-Baptiste Oudry (1737). En arrière-plan, l'abbaye de Royallieu.
De l'abbaye au parc de Bayser
En 1624, le prieuré est rattaché à la Congrégation de France. Puis, en 1626, à la mort de l'abbé commendataire René Le Caron, il est reconverti en économat durant quatre années avant d'être donné en commende à l'évêque de Glandèves, René Leclercq.
Le 26 mars 1634, les moines de Royallieu échangent leur résidence avec les religieuses bénédictines de Saint-Jean-aux-Bois. L'abbaye de Royallieu connait d'importants travaux (notamment à partir de 1692) sous la direction des sept abbesses qui s'y succèdent.
Le domaine est sécularisé sous la Révolution française puis transformé en hôpital militaire. La paroisse Saint-Germain se voit attribuer des meubles et les pierres tombales. L'abbaye connait d'importantes démolitions jusqu'à sa reconversion en résidence de villégiature. Etienne Balsan (1878-1953) y établi un château et un vaste parc, racheté depuis par la ville de Compiègne: le parc de Bayser.
Des noms de rues comme  "la rue du Couvent", "le Square des Abbesses" ou le "Chemin Sainte-Catherine" rappellent l'ancienne abbaye.
Un casernement extra-muros
Au cours du 19e siècle, le faubourg de Royallieu se développe vers le sud, entre l'ancienne abbaye et la forêt. En 1913, tandis que la France et l'Allemagne s'affrontent sur le terrain diplomatique, l'Etat porte le service militaire à trois ans (loi du 7 août 1913) et soutient la construction  de nouveaux casernements. Compiègne, ville de garnison soucieuse d'étendre sa place militaire, propose qu'une caserne soit construite au nord du faubourg de Royallieu.
Les terres de cultures sont achetées en juin 1913 et les travaux commencent quelques semaines plus tard. Vingt-quatre baraquements en briques de soixante mètres de long pour seize de larges sont édifiés sur un quadrilatère de 16 hectares. Disposés en U autour d'une place d'armes, ces pavillons regroupés  sous la dénomination A, B et C masquent des annexes (stand de tirs, ateliers, magasins, mess, hangars, infirmerie, lavoirs, bains, douches...) disposés en arrière. Le 54e RI prend possession des bâtiments par échelon, le 3e bataillon le 15 janvier 1914 (A), le 1er bataillon en février (B) et le 2e bataillon en mai (C).
L'Hôpital temporaire n°16
Avec la déclaration de guerre, le 54e RI quitte son casernement de Royallieu qui est reconverti en dépôt pour  des "troupes exotiques" (Hilarion Ligouzat). A cette fin, des appareils de chauffage sont installés pour l'hivernage.
En décembre 1914, la caserne est transformée en hôpital pour blessés légers et devient l'hôpital temporaire n°16 avec un potentiel de 1500 lits.
C'est là que le docteur Aimé Hamant met au point la suture primitive des plaies en 1915.
Evacué de juin à juillet 1918 en raison de l'offensive allemande sur le Matz, l'hôpital est réoccupé par l'autochirugicale n°7 et par plusieurs ambulances.

La caserne du 54e RI puis du 67e RI et des Aérostiers
Durant l'entre-deux-guerres, la caserne Royallieu retrouve sa vocation première en retrouvant son régiment retiré du front.
Un cimetière national 14/18 est aménagé au bout de la rue Rouget-de-l'Isle en 1921 à l'emplacement du cimetière de l'hôpital temporaire n°16.

La caserne de Royallieu reçoit alors plusieurs unités réparties par groupe de baraquements:
- Le 54e RI (1919-1923), le 2e bataillon d'Aérostiers (B) et un bataillon de Mitrailleurs Coloniaux (DMIC, A).
- le 3e bataillon du 67e RI (1923-1939), le 2e bataillon d'Aérostiers.
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