Présentation du document: Cette lettre dactylographiée datée de Vichy le 28 janvier 1941 est adressée aux préfets par le Ministre secrétaire d’Etat à l’Intérieur. Elle ordonne au préfet de l’Oise de prescrire une enquête permettant d’inventorier les biens, droits et intérêts des six personnes désignées en l’occurrence le colonel de Larminat, Aristide Antoine, Pierre Lapie, le général De Gaulle, le général Catroux et le général Legentilhomme. Tous sont activement recherchés comme séditieux et ont été déchus de la nationalité française à dater du 8 décembre 1940.
Cette lettre émane du service de la sécurité du territoire, dont une copie a été transcrite au commissaire de police de Beauvais, comme l’indique la note marginale. Bien entendu, les hommes recherchés sont à Londres où ils organisent la Résistance armée. De fait, leur recherche sur le territoire national est vaine ; l’enquête prescrite a pour but d’établir un inventaire de biens qui, à terme, seront nationalisés. Elle a aussi pour but de faire savoir quelles dispositions sont prises pour les personnes qui seraient tentées de rejoindre la résistance : elles perdraient tout et leur famille serait aussi victimes de cette forme de répression.
Contexte:
En cette fin d’année 1940, la France a changé de régime. La III e République a laissé la place à un nouveau régime : l’Etat Français, dont le siège est à Vichy. Face au Maréchal Pétain, devenu chef de l’Etat, le général De Gaulle n’a pas accepté la défaite et, outre-manche, organise une armée auprès de son allié anglais puis à partir des territoires de l’empire français. Le Tchad, le Congo, le Cameroun et le Gabon rejoignent la France Libre en novembre 1940. De fait, l’appel du 18 juin prend forme à travers une armée et sur des territoires français, annonçant la réalité d’une reconquête sans doute embryonnaire mais menaçante pour le régime de Vichy. La déchéance de la nationalité française et ses prolongements en terme de nationalisation de biens et de contraintes familiales affirme la position de l’Etat français contre la France Libre.