Parachutage-Champlieu

Le parachutage de Champlieu (14-15 juin 1943)

par Jean-Pierre Besse

 

Ce parachutage est destiné au réseau Jean-Marie.  Il a lieu dans la nuit du 14 au 15 juin 1943, à l'orée de la forêt de Compiègne, non loin des ruines romaines de Champlieu, sur le territoire d'Orrouy. Il est annoncé par le message suivant : "Les rondelles de saucisson s'arrosent au vin blanc".


Déroulé de l'opération

André Pons, alias "Ken", qui a été chargé de l'organiser, est le chef du secteur de Compiègne. Il dirige personnellement le groupe des Bleuets qu'il a constitué sur Compiègne et Margny-lès-Compiègne.

Dix-huit personnes se retrouvent sur les lieux, parmi lesquelles quatre Parisiens dont l'adjoint au chef national du réseau Roger et des membres d'un groupe de résistants de Béthisy-Saint-Pierre dirigé par Fulbert Bombars. Deux hommes sont en couverture (Roger Maniette ou Mainetti et François Camus).

La cargaison est répartie en containers de 300 kilogrammes qui renferment chacun trois fûts métalliques où sont logées les armes. Malgré les signaux, deux containers sortent du périmètre et vont atterrir près d'une ferme où elles sont récupérées. C'est la camionnette d' Emile Rossi qui est utilisée pour le transport de la cargaison à Margny-lès-Compiègne où elle est stockée dans une fonderie. Dans les jours qui suivent, la plus grande partie, grâce à la camionnette de Picq, est répartie dans différentes caches ( Ribécourt, chez Madame Boissonnet, chez le père d' André Pons et à la Faisanderie). Le restant est acheminé par un véhicule appartenant à Emile Rossi, également à la Faisanderie.


L'un des participants, Christian Desseaux, a écrit :

"Ca fait partie des plus belles choses qu'on peut faire dans sa vie : réceptionner en pleine nuit, au clair de lune au milieu d'une grande forêt de Compiègne, des parachutes tombés du ciel avec des armes au bout pour libérer son pays".



Résistants présents à Champlieu :

Roger, André Guérin (alias "Renard" ou encore "Le Bouc"),

Romuald Derette ("Romu") et Louis,

André Cotteret,

Jacques Deflers,

Christian Desseaux,

Fernand Goret,

Norbert Leleu,

Raymond Leleu,

Alfred Mousset,

Michel Picq,

André Pons,

Henri Tedeski.

Fulbert Bombars,

Edouard Lefèvre

Lucien Snauwaert de Béthisy-Saint-Pierre.
André Dumontois, chef du groupe de sabotages, alias "Jean de Noyon".

Récit du parachutage de Champlieu par André Pons

Extrait de l’ouvrage de Maurice PICARD, L’Occupation et la Résistance dans la vallée de la Basse Automne, 1994, 40 pages


A Compiègne :

Après bien des difficultés, je constitue, entre autres, le groupe des  "Bleuets", qui est destiné avec le groupe de Béthisy, à réceptionner les parachutages d’armes et d’explosifs.

Le 14 juin 1943, malgré le brouillage des ondes par les Allemands, nous parvient la phrase : « Les rondelles de saucisson s’arrosent de vin blanc ». C’est la phrase convenue annonçant qu’un parachutage d’armes aura lieu dans la nuit du 14 au 15 juin à Champlieu.

Le groupe des Bleuets venant de Compiègne à bicyclette par groupes de 2 ou 3, espacés de 10 à 15 minutes, arrive au point de ralliement où je me trouve déjà avec 4 « Parisiens » dont Roger l’adjoint du chef national. Nous dirigeons le groupe à proximité du terrain. Vers 22 heures, tout est en ordre. Peu de temps après nous voyons des ombres se profiler au clair de lune , Fulbert Bombars arrive à pied de Béthisy : « Je prends maintenant la direction des opérations ». Pour moi c’était tout à fait normal, nous avions déjà convenu à l’avance. C’était mon premier parachutage.

Vers 23 heures Roger procède à la distribution de 5 lampes torches destinées au repérage par l’avion venant d’Angleterre, du terrain de parachutage. Il rappelle les signaux à émettre sur son ordre et place les baliseurs. Roger me demande de faire mettre mes camarades sous bois et me place auprès de lui : « Reste à côté de moi afin que je t’explique comment opérer pour les prochains parachutages, je n’y serai pas, ni les autres « Parisiens ».

Il est minuit environ, lorsque l’avion se présente une première fois. Sur l’ordre de Roger, les signaux sont émis. C’est à son second passage qu’il largue une dizaine de containers retenus par leurs parachutages qui se distinguent si bien dans le beau clair de lune. C’est seulement vers 4 heures du matin que tous les containers sont rangés sous bois. Fulbert Bombars et ses hommes repartent à Béthisy avec 2 valises.

Trois acteurs du parachutage de Champlieu quelques décennies plus tard.
A droite, André Pons.

Trahisons

Cependant un agent double s'était introduit dans le réseau.
Le 6 juillet 1943, sont arrêtés à Compiègne Madame Boissonnet (déportée) et Hubert Laffitte qui travaille à la Faisanderie où des armes sont cachées, et à Paris André Dumontois.
Puis, dans les jours qui suivent, François Camus (mort en déportation), Christian Desseaux (déporté), Michel Picq (déporté), Charles Gass (mort en déportation), André Baduel (mort sous la torture).
Robert Pons est interné six mois et André Pons échappe à l'arrestation, il était à Paris en mission lorsque les Allemands vinrent pour l'arrêter dans la nuit du 14 au 15 juillet 1943.

Sont arrêtés en octobre : André Cotteret (mort en déportation) et Jacques Deflers (déporté), Alfred Mousset (mort en déportation).

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