La rafle de Salency (1er juillet 1944)
par Jean-Yves Bonnard
Dès le 23 juin, soir de l’attaque du Maquis de Crisolles, des camions allemands stationnent sur la place du village où est domicilié un jeune agent de liaison capturé quelques jours plus tôt. Liste de noms en main, des Allemands se présentent à la mairie pour procéder à des arrestations. Ils soupçonnent des relations entre les villageois et le maquis mais n’ont pas de preuves.
Si cette visite n’a pas de conséquences, le 1er juillet suivant, une cinquantaine de camions allemands pénétrèrent à Salency. Deux cents Allemands conduits par leur chef Schmidt, cernent le village et arrêtent hommes, femmes et jeunes qu’ils regroupent en divers lieux notamment près du jeu d’arc et du Cavin. Les Allemands inspectent les maisons, procèdent à de nombreuses arrestations sommaires dans le village de Salency considéré comme lieu de ravitaillement du maquis des Usages.
Les arrestations
Après avoir écarté les femmes, les jeunes et les hommes de plus de quarante ans, 34 hommes sont rassemblés au lieu-dit Le Cavin. Il s’agit de Fernand Bohère, Kléber Boitieux (Noyon), André Boulanger, Georges Boulanger, Honoré Bulfoni, Gabriel Capelle, Albert Carbonnier, Marcel Carreau, Joseph Cavé, Michel Dawosyr (Sempigny), René Décressionnière, Maurice Derrieux, Guy Desaintquentin (Noyon), Adrien Desprez, Frédéric Doré, Louis Dubois, Reynold Duchauffour, Georges Dufour (Noyon), Jacques Gaudet, Jean Lalouette, Clément Leclerc, Jeannot Lesueur, Noël Lesueur, Jean Le Floch, Maurice Momeux, Marcel Momeux, Edmond Polin, Jean Picard, Henri Pineau, Germain Quillet, Louis Rémia (Longueil-Annel), James Sézille, Yves Sézille et Ernest Trouvay.
En fin de journée, au lancement de fusées dans le ciel, les Allemands se rassemblent. Les hommes raflés sont conduits par camions à Compiègne, où ils sont incarcérés dans la maison d’arrêt et interrogés en présence d’un interprète.
Louis Rémia est relâché en fin de journée. Carbonier, Derrieux, Dawosyr, Dubois et Marcel Momeux seront relâchés une semaine plus tard.
Requis pour le STO
Le 13 juillet, neuf hommes sont désignés pour travailler en Allemagne au titre du STO dans l'industrie de guerre. Il s’agit de Bohère, Desprez, Duchauffour, Lalouette, Lesueur Noël, Lesueur Jeannot, Momeux Maurice, Quillet et James Sézille. Transférés par train dans des wagons à bestiaux à la caserne de la Pépinière à Paris, ils sont dirigés vers Magdebourg où ils sont séparés. Ainsi, Noël Lesueur, Jeannot Lesueur et Reynold Duchauffour travaillent dans une usine de munitions. James Sézille, Maurice Momeux et Jean Lalouette deviennent chauffeur de locomotives. Adrien Desprez est affecté dans une fonderie d’aluminium. L'un d'entre eux, Fernand Bohère, est tué lors d’un bombardement de Dessau, le 7 mars 1945.
Le bombardement de la gare de Compiègne
Le 6 août, les détenus salenciens de la prison d’arrêt sont internés au camp de Royallieu. Au cours de cette période d’internement, quatorze des dix-neuf raflés de Salency sont désignés pour participer aux travaux de dégagement de la gare de Compiègne, en partie détruite par les bombardements alliés.
Le 9 août 1944, l’aviation américaine bombarde de nouveau les voies de Compiègne provoquant d’importantes destructions et de nombreuses morts parmi les gardes allemands et les prisonniers. Trois salenciens y trouvent la mort : Georges Boulanger, étouffé sous les gravats, Jean Le Floch, déchiqueté et Ernest Trouvay. Les dix autres salenciens profitent des circonstances pour s’évader. Seul, l’un d’entre eux est repris et renvoyé à Royallieu.
En déportation
Le 17 août, les six hommes restant de la rafle de Salency sont embarqués dans le dernier train partant de Compiègne pour Buchenwald. Quatre d'entre eux décèdent en déportation : André Boulanger, Frédéric Doré, Jean Picard, Edmond Polin.
Le 4 juin 1950, Salency reçoit la Croix de Guerre 39/45 avec étoile d’argent des mains du sous-préfet de Compiègne.