Saint-Germain-la-Poterie : maquis ou camp de prisonniers ?
Une première version présentée par Jean-Pierre Besse après un entretien à Louis Dalmas de Polignac en octobre 2007 laisse supposer que ce dernier aurait formé un maquis de Soviétiques dans la ferme que possède son beau-frère à Saint-Germain-la-Poterie. Selon Yves-Marc Ajchenbaum, Daniel Nat s’y autoproclame capitaine et Louis Dalmas lieutenant (voir photographie ci-contre). A la Libération, le drapeau rouge agrémenté d'une faucille et d'un marteau flotte à l'entrée de la propriété, une pancarte en russe indique "Ici territoire soviétique". Quelques jours après la Libération, la brigade de gendarmerie d'Auneuil signale qu'il y a là soixante-deux hommes, six Espagnols et cinquante-six Soviétiques.
Une autre version, plus probable, est présentée par Frédéric Charpier dans son Histoire de l’extrême-gauche trotskiste. Il y fait état de l’existence d’un camp de détention où les Allemands ont « parqué pêlemêle, au camp de Beauregard, des femmes, des enfants, des civils, des militaires, russes, ossètes, tcherkesses et d’autre nationalités encore ». Selon lui, ce camp est à l’origine d’un regroupement plus massif à la Libération : « Mais en ce mois de septembre 1944, que faut-il faire de ces prisonniers que les Allemands ont laissés derrière eux ? Les autorités françaises décident de les confier à Louis Dalmas. Vika, la femme de Daniel Nat, un des piliers de la communauté, et Ida, l’épouse de Claude Bourdet, l’un des chefs du mouvement Libération, sont mises à contribution. Elles parlent le russe, et da occupe même des fonctions de premier plan au sein de l’organisme gouvernemental chargé des prisonniers de guerre et des déportés. Une centaine de « soviétiques » dépendent maintenant de Dalmas. Ils viennent s’installer à Saint-Germain-la-Poterie. Parmi eux, trois seulement fréquentent les Français ; le tcherkesse Sermian, un colosse à la force herculéenne, Baranov, un médecin mélancolique, et Victor Vycherski, un jeune ouvrier métallurgiste de Léningrad et komsomol, membres des jeunesses communistes soviétiques. Le « château » de Louis Dalmas ressemble de plus en plus à un phalanstère ou à une brigade internationale en miniature si on ajoute aux Russes le Luxembourgeois Pierre et les deux Espagnols, qui ne doivent qu’à Louis Dalmas d’être encore à Saint-Germain-la-Poterie (…) Louis Dalmas préside une sorte de République soviétique miniature. La nourriture est fournie par la subdivision militaire de la région. Dalmas et De Sède occupent la centaine de Russes, d’Ossètes et de Tcherkesses à des travaux de déboisement et d’électrification. Pour le reste, les Soviétiques ont toute latitude pour s’organiser entre eux. Leur chef « autoproclamé » est un certain major Mechkov, qui a aménagé dans la cave une prison ! Cest des premières mesures qu’il a prises. La seconde a été d’inviter Dalmas et De Sède à lever un verre à la révolution d’Octobre. Un verre rempli d’un sévère tord-boyaux composé d’essence et de pommes de terre fermentées. »